LE SOLEIL (DP) n°14128 - Page 10 - LE SOLEIL - LUNDI 12 JUIN 2017 Economie & Finances www.lesoleil.sn 10 CYANMAGENTAJAUNENOIR En ce samedi après-midi, l’air est poussiéreux et brûlant, à Médina Bichi. Ici, le thermomètre dépasse facilement les 40 degrés et peut monter jusqu’à 45. Malgré la forte canicule, les habitants de ce village situé dans l’arrondissement de Bamba Thialène, à 25 kilomètres de Koumpentoum, chef-lieu du département, ont réservé un accueil chaleureux à la délégation du Programme d’urgence de développement à communautaire (Pudc), conduite par Cheikh Diop, directeur national. Ils ont gratifié leurs hôtes de belles chorégraphies. Les jeunes et les femmes ont rivalisé d’ardeur avec des mouvements dont ils maîtrisent les secrets. Son fils, en califourchon, Anthia a ravi la vedette aux autres. Leur jubilation en dit long sur l’importance de l’ouvrage. Une mini-centrale solaire d’une capacité de 15 kilowatts d’un montant de 98 millions de FCfa justifie cette joie contagieuse dans ce village excentré avec un faible accès aux infrastructures sociales de base. En chœur, les différents orateurs ont exprimé leur joie. « Je n’ai jamais été heureux qu’en ce jour et je ne pourrais plus être plus heureux », témoigne le chef de village, Alpha Ndimbalane. «En 2010, quand Macky Sall était venu à Médina Bichi, il avait promis de faire quelque chose pour nous, s’il accédait au pouvoir. Je n’avais pas beaucoup d’espoir malgré sa promesse parce que, avant lui, d’autres hommes politiques avaient fait la même promesse. De plus, les investissements étaient déviés vers d’autres villages qui avaient des hommes politiques ou de hauts fonctionnaires », a-t-il rappelé. Dans l’assistance, la fillette Mariama Ndimbalane attire l’attention. Agée de huit ans, elle suit attentivement les interventions sans certainement en saisir toute la portée. Mais une chose est sûre, cette mini-centrale va changer sa vie. A la rentrée prochaine, elle n’étudiera plus avec une lampe tempête ou une bougie comme ses frères et sœurs. Mariame pourra également étancher sa soif avec de l’eau fraiche du frigo et non de l’eau de canari. Avec 10 ou 25 FCfa, elle gouttera au bonheur de sucer une glace. Ce qui est une banalité en ville, est un luxe dans cette partie du territoire. Créé en 1953, le village de Médina Bichi a peu bénéficié des investissements publics et manque presque de tout. Et les adultes mesurent le rôle que l’électricité peut jouer dans l’amélioration de leurs conditions de vie. Leur optimisme est grand, trop même, concernant le rôle social de premier plan de cette source d’énergie. Ceux qui vont en ville ou qui y séjournent ont un aperçu des progrès apportés par l’électricité. Pour boire de l’eau fraîche, il faut débourser 300 FCfa et parcourir 25 kilomètres alors que le sachet s’échange à 50 FCfa à Dakar et 100 FCfa dans les autres villes. En période de Ramadan, le prix est doublé à cause de la forte demande. Soulagement L’électricité allégera également les travaux des femmes surtout pour la mouture. A Médina Bichi, les femmes continuent à piler le mil comme du temps de leurs grands-mères. Dans la plupart des localités en zone rurale du Sénégal, certaines tâches dévolues aux femmes s’exécutent encore, malheureusement, dans bien des cas, à l’aide de la force musculaire avec des instruments rudimentaires. « Regardez mes mains, elles sont dures mais quand on aura de l’électricité, elles seront lisses parce que je ne pilerais plus le mil », déclare Marame, une jeune fille, avec un large sourire. L’ouvrage qui branche Médina Bichi à la modernité est doté d’un groupe électrogène de secours destiné à alimenter le village avec un réseau basse tension, a expliqué le technicien Pape Momar Ngom. Il souligne que la centrale est modulaire et peut augmenter sa puissance en fonction des charges, c’est-à-dire des besoins. «Les habitants pourront raccorder tous types de matériels. Elles n’ont pas de limite. Il n’y a que la source d’utilisation qui change », a indiqué M. Ngom. Toutefois, comme tous les usagers, ils devront payer un montant pour assurer la maintenance et le renouvellement des équipements. Les poteaux solaires sont installés et il reste quelques « réglages » à faire pour le raccordement. Le technicien assure que la réception se fera dès que le réseau basse tension sera terminé. La mini-centrale sera gérée par un opérateur qui, une fois la mise en service terminée, la transférera au ministère de l’énergie qui en assurera la maintenance et le renouvellement des installations, a expliqué Pape Momar Ngom. Le directeur national du Pudc, Cheikh Diop, est revenu sur la genèse du programme. Il a rappelé que c’est le fruit de la réflexion du président Macky Sall qui, après une tournée nationale pendant laquelle il avait, bien avant sa candidature à la magistrature suprême et son élection à la tête de l’État, discuté et recueilli les doléances des populations des zones rurales. A travers ce programme, a-t-il souligné, le chef de l’État veut réduire les inégalités entre les zones urbaines et rurales par une meilleure allocation des ressources nationales, en dotant les zones rurales d’infrastructures et services sociaux de base capables de redynamiser et de fouetter l’économie sénégalaise à partir des terroirs. Le directeur du Pudc a invité les populations de Médina Bichi à veiller sur la mini-centrale en évitant surtout de jeter des cailloux sur les plaques solaires. Un message bien reçu. Mamadou GUEYE ELECTRIFICATION RURALE Le Pudc équipe Médina Bichi d’une mini-centrale solaire de 15 kilowatts Les populations de Médina Bichi disposeront, bientôt, de l’électricité grâce à une mini-centrale solaire qui améliorera sensiblement leurs conditions de vie. L’ouvrage qui branche ce village à la modernité suscite un grand optimisme, compte tenu de l’importance de cette source d’énergie, dans la vie. Le volet électrification rurale bénéficiera à plus de 300.657 personnes En termes d’accès des populations aux services sociaux de base, notamment l’électricité, les disparités sont criantes, selon les régions. Seuls 12 % des villages du Sénégal sont actuellement électrifiés. La région de Dakar a un taux de 86 % suivi de la région de Fatick avec 47 % ; les régions de Kaolack, Kaffrine, Sedhiou, Louga, Kédougou et Tambacounda ont une accessibilité relativement faible avec moins de 10 %. Le Programme d’urgence de développement communautaire ambitionne de réduire ses disparités. Il prévoit d’électrifier 466 villages dont 310 par raccordement au réseau moyenne tension ou basse tension et 110 par voie solaire ; de construire 102 centrales solaires avec réseau basse tension ; de réaliser 3.188 kilomètres de réseau dont 1.879 moyenne tension (MT) et 1.309 basse tension ; de réaliser des installations intérieures et branchements au profit de 20.800 ménages, etc. Pour l’électrification par raccordement au réseau moyenne tension ou basse tension, les travaux ont démarré dans 283 villages avec l’implantation de 3.641 poteaux électriques moyenne tension et 5.743 poteaux basses tension. L’appel d’offres pour les travaux des installations intérieures de 20.800 ménages dans les villages électrifiés est publié. Concernant l’électrification par voie solaire, les travaux ont également démarré dans 23 villages. La construction des centrales solaires est en cours et trois centrales solaires (bâtiment préfabriqués et champs photovoltaïques) sont déjà réceptionnées. A terme, le volet électrification rurale bénéficiera à plus de 300.657 personnes. M. G. LUTTE CONTRE LA PAUVRETE Boubacar Camara propose la méthode Era comme solution Le ministre de l’Agriculture et de l’Équipement rural, Dr Papa Abdoulaye Seck a présidé, samedi dernier, la cérémonie de dédicace du livre de Boubacar Camara, un retraité de l’Unesco. Intitulé « Comment sortir de la pauvreté », l’ouvrage publié aux éditions l’Harmattan Sénégal contient près de 220 pages. Selon l’auteur, vaincre la pauvreté, c’est d’abord vaincre l’ignorance, ensuite le manque d’éducation et de formation de qualité des populations défavorisées en particulier les femmes qui en constituent la majorité. Il soutient que l’éducation des filles et des femmes doit occuper une place essentielle dans la problématique du développement durable à l’ordre du jour en Afrique et dans le reste du monde. Il explique que cette donne n’est souvent pas suffisamment reflétée dans les politiques et stratégies de mise en œuvre. Pour sortir de la pauvreté, Boubacar Camara propose une méthode combinant l’éducation, la responsabilité et l’autonomisation (Era). Autrement dit, il met en relief les aspects de savoir, de pouvoir et d’avoir. Il affirme que la construction de la nouvelle Afrique passe par la mise en place d’une stratégie de reconstitution nationale s’appuyant sur le renouveau de l’éducation et la renaissance culturelle. Des initiatives originales et des programmes novateurs sont, selon lui, à démultiplier en priorité dans les zones les plus défavorisées, rurales et périurbaines. Poursuivant ses pistes de solutions, Boubacar Camara est d’avis que sur le plan opérationnel, il faut l’élaboration et la mise en œuvre de plan cadre de reconstruction nationale comportant un programme fondamental articulé à des programmes intégrés de développement zonal. A l’échelon décentralisé, il propose un centre d’éducation communautaire intégré dans chaque localité, la maîtrise de l’apprentissage participatif multidimensionnel et la multiplication des filières intégrées de valorisation des productions, de densification des chaines de valeur. Pour Papa Abdoulaye Seck, cet ouvrage n’est pas un de plus. Le ministre de l’Agriculture affirme qu’il n’est pas une somme d’opinions. Il est le résultat d’une théorie maîtrisée et d’une pratique avérée. L’ouvrage, explique M. Seck, est une démarche scientifique rigoureuse riche en mouvements et couleurs présentant une belle harmonie. Évoquant les enseignements qu’il tire de ce livre, Papa Abdoulaye Seck souligne que la lutte contre la pauvreté ne doit pas être décrétée. Elle repose sur une stratégie adossée à une science qui doit être domestiquée. L’autre enseignement, expliquet-il, c’est l’importance de l’éducation et de la formation, qui sont fondamentales pour progresser. Il n’a pas manqué de revenir sur les qualités de Boubacar Camara, un homme d’une grande dimension intellectuelle, morale et qui a le sens de l’honneur et de la générosité. M. Camara est un ingénieur statisticien, docteur en économie et expert en planification de l’éducation. Il a été membre du secrétariat de l’Unesco de 1984 à 2013, date de son départ à la retraite. Aliou KANDE «Comment sortir de la pauvreté ?». C’est l’intitulé de l’ouvrage de Boubacar Camara, ingénieur statisticien, économiste, retraité de l’Unesco en 2013. Publié aux éditions l’Harmattan Sénégal, il a été présenté samedi dernier sous la présidence du Dr Papa Abdoulaye Seck, ministre de l’Agriculture et de l’Équipement rural. LE SOLEIL - LUNDI 12 JUIN 2017 www.lesoleil.sn Economie & Finances 11 L’amicale des femmes des ministères de l’Agriculture, de l’Élevage, de l’Hydraulique et de l’Assainissement a choisi de réfléchir sur les opportunités de l’agriculture au Sénégal, au cours de leur 12e conférence religieuse, tenue samedi, un thème introduit par la conseillère technique au ministère de l’Agriculture et de l’Équipement rural, Sokhna Mbaye Diop. Dans sa communication, elle a indiqué que notre pays regorge d’énormes potentialités en ressources (eau, terres arables et irrigables, main d’œuvre), facteurs importants pour le développement d’une agriculture à même d’assurer la sécurité alimentaire de sa population. C’est pour matérialiser cette vision, à son avis, que l’agriculture est considérée comme le moteur du développement économique et social à travers le Plan Sénégal émergent (Pse) et plus particulièrement le Programme d’accélération de la cadence de l’Agriculture sénégalaise (Pracas). Cette initiative vise, a rappelé Mme Diop, à atteindre l’autosuffisance en riz en 2017 avec une production de 1,6 million de tonnes de paddy, en oignon en 2016 avec une production de 350.000 t, l’optimisation des performances de la filière arachidière avec une production, en 2017, d’un million de tonnes et un volume d’exportation de 100 à 150.000 t par an, le développement des filières fruits et légumes de contre-saison avec un objectif d’exportation de 157.500 t en 2017. Pour traduire en acte cette stratégie, l’État a, a précisé la conseillère technique, pris des mesures comme la subvention des intrants agricoles à hauteur de 55 % pour l’engrais, 60 % pour les semences, 70 % pour le matériel agricole et 100 % pour les produits phytosanitaires, la reconstitution du capital à hauteur de 5 milliards de FCfa chaque année, la détaxation du matériel agricole pour la mobilisation du secteur privé, l’aménagement de 5.000 ha par an de périmètres irrigués villageois, etc. De l’avis de Mme Diop, ces mesures ont permis d’avoir les résultats probants en 2016 avec la maîtrise de l’eau, le renforcement de la production à travers la mise en place de facteurs de production comme les intrants et le matériel agricoles : 51.220 t de semence d’arachide dont 30.153 t certifiées, 5.505,7 t de semence de riz, 81 502 t d’engrais et 15.000 semoirs, 920 tracteurs, 50 batteuses à riz, etc. Ces investissements ont permis d’avoir des productions record avec 991.427 t d’arachides, 2.124.668 t de céréales dont 945.617 t pour le riz et 1.188.810 t de produits horticoles dont 393 225 t d’oignons, a-t-elle informé. Avec un volume du financement de 156,6 milliards de francs Cfa, les résultats du secteur de l’agriculture ont impacté, dit-elle, positivement sur le taux de croissance de l’économie du secteur avec 6, 52 %, la part de l’agriculture dans le Pib réel évaluée à 7 %, la valeur ajoutée agricole évaluée à 468, 8 milliards de francs Cfa et la couverture des besoins nationaux en céréale 54% en 2016. Ce sont autant de faits qui font dire à Mme Diop que « l’agriculture occupe une place importante dans la transformation structurelle de l’économie sénégalaise et constitue une priorité ». La présidente de l’amicale, Aïda Guèye, a magnifié les résultats satisfaisants obtenus par le ministère de l’Agriculture, avant d’inviter ses camarades à véhiculer les résultats satisfaisants du Pracas. Pour leur part, Oustaz Idrissa Gaye et Imam Lamine Sarr ont, quant à eux, sensibilisé l’assistance sur les méfaits du mensonge, de la médisance, de l’hypocrisie et leurs dérivés. Un croyant musulman doit éviter, ont-ils rappelé, de tenir des propos malsains à l’encontre de son prochain. Souleymane Diam SY FINANCEMENT L’agriculture a reçu 156,6 milliards de FCfa en 2016 La conseillère technique du ministère de l’Agriculture et de l’Équipement rural, Mme Sokhna Mbaye Diop, a indiqué que le volume du financement du secteur de l’agriculture a atteint 156, 6 milliards de francs Cfa en 2016. Elle s’exprimait, samedi, lors de la conférence religieuse annuelle de l’amicale des femmes des ministères de l’Agriculture, de l’Élevage, de l’Hydraulique et de l’Assainissement. SECTEUR AGRICOLE ET RURAL L’Ipar se dote d’un nouveau plan stratégique Pour structurer sa vision de développement du secteur agricole et rural, l’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar) s’était dotée d’un plan stratégique 2010-2015. Sa mise en œuvre a permis à l’organisation de peaufiner sa stratégie d’intervention sur le long terme et d’engranger d’importants acquis notamment sur la gouvernance foncière ; le changement climatique, l’emploi des jeunes. Cependant, les mutations intervenues dans le contexte global et sur le plan national exigent une adaptation continue de l’Ipar pour faire face aux nouveaux enjeux et défis du développement. C’est dans ce cadre que s’inscrit ce second plan stratégique 2017-2021 qui est la suite logique du premier. Ce nouveau plan a été présenté, hier, sous la présence du ministre Papa Abdoulaye Seck. Selon Dr Cheikh Oumar Bâ, directeur exécutif de l’Ipar, l’objectif de ce plan est de fournir à l’organisation, un référentiel d’orientations et un cadre stratégique sur cinq ans, en prenant en compte les changements intervenus dans le contexte national, régional et international. Il est articulé sur cinq axes stratégiques. Le premier a trait au renforcement de la gouvernance institutionnelle de l’Ipar. Le second axe porte sur le développement d’une recherche de qualité. Quant au troisième, il concerne le renforcement des capacités des acteurs. Les quatrième et cinquième axes sont liés à la promotion du dialogue politique, à assurer la pérennité, à la durabilité et à la consolidation des acquis. Pour les modalités de mise en œuvre, explique Dr Bâ, elles sont articulées sur les stratégies de communication et de mobilisation des ressources et le mécanisme de suivi-évaluation. Il n’a pas manqué de souligner l’importance pour une organisation, d’avoir une planification stratégique. Rappelant que ce nouveau plan stratégique coïncide avec la découverte de pétrole et de gaz au Sénégal, le directeur exécutif de l’Ipar invite le gouvernement à ne pas oublier le secteur de l’agriculture comme l’ont fait certains pays africains. Il précise que ce plan constitue une occasion pour sensibiliser le gouvernement et ses partenaires sur la nécessité de sécuriser notre agriculture. Le ministre de l’Agriculture et de l’Équipement rural a salué la contribution de l’Ipar dans le développement de la recherche au Sénégal et dans le reste de l’Afrique. Papa Abdoulaye Seck a souligné l’importance de la prospective qui est, à son avis, un intrant stratégique pour l’émergence d’une agriculture forte. «Il est important d’être dans une dynamique de rationalisation du devenir. Il s’agit d’inventer au lieu d’être inventé. D’où l’importance d’une planification stratégique», a déclaré M. Seck. Commentant les cinq axes stratégiques de l’Ipar, M. Seck a évoqué l’importance de l’innovation pour changer le secteur de l’agriculture. Sur ce point, il a souligné l’importance de la diversification dans l’agriculture. C’est pourquoi, il soutient qu’une agriculture forte, est une agriculture diversifiée. La question foncière, affirme M. Seck, est également fondamentale pour le développement de l’agriculture. Avant de terminer son propos, Papa Abdoulaye Seck a plaidé pour une économie diversifiée avec une agriculture forte comme le veut le président Macky Sall. «Ce que nous voulons, c’est l’avènement d’une agriculture forte au dividende partagé», a confié le ministre de l’Agriculture. Aliou KANDE L’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar), institution de recherche créée en 2008, a présenté, hier, son nouveau plan d’actions. Couvrant la période 2017-2021, ce document est articulé au tour de cinq axes stratégiques. Papa Abdoulaye Seck, ministre de l’Agriculture et de l’Équipement rural. LE SOLEIL - LUNDI 12 JUIN 2017 Economie & Finances www.lesoleil.sn 12 Ce projet de promotion de la pisciculture dans la vallée de Senghor, qui concerne 11 villages de la commune de Toubacouta, dans le département de Foundiougne, a démarré en 2013 et doit prendre fin en décembre 2017. Il ambitionne de «lutter contre la pauvreté et de renforcer la lutte contre l’insécurité alimentaire», a expliqué le coordonnateur de l’équipe nationale de mise en œuvre de «Go-Wamer», un projet dont le financement s’élève à plus de 6 milliards de francs CFA (10 millions 500 euros). L’Union européenne (Ue) a mobilisé 90% de l’investissement. Le Pnud, organe exécutif du projet, a dégagé 10% du financement. «Nous avons utilisé un aliment très riche, c’est ce qui a donné ces résultats satisfaisants», a souligné Mamadou Thiam, lors d’une récolte de tilapias à laquelle il participait, dans cette initiative de promotion de la pisciculture. Les objectifs de production ne seront toutefois pas atteints, a-t-il dit, déplorant, par ailleurs, des cas de vols notés. «C’est d’ailleurs cela qui a précipité la récolte. On a récolté à 5 mois mais on devait attendre 6 mois», a-t-il précisé. Il assure, cependant, que «cette récolte précoce n’a pas eu d’impact négatif sur la qualité du produit qui a atteint une taille commerciale satisfaisante», avant de préconiser «une surveillance rigoureuse du site par les populations bénéficiaires», pour éviter de pareilles situations. «Nous allons essayer de mettre en place les dispositifs qui permettront de décourager les malfaiteurs», a-t-il indiqué, ajoutant que de même, la sensibilisation sera accentuée dans les villages voisins, relativement à «l’importance de cette ferme qui représente un investissement communautaire». Le coordonnateur de l’équipe nationale de mise en œuvre de «GoWamer», Mamadou Thiam, s’est, par ailleurs, réjoui de l’engouement autour de cette activité génératrice de revenus pour les populations bénéficiaires. Les populations de Santhie Béra et des villages voisins de Toubacouta et de Sokone sont venues nombreux sur le site. Elles se sont partagé la production disponible, moyennant 1000 F Cfa le kilogramme, un prix fixé par l’Agence nationale d’aquaculture (Ana), partenaire technique du projet. «J’aurais souhaité que les bailleurs soient là pour voir l’engouement qu’il y a autour de cette activité», pour qu’ils soient encouragés à «financer davantage le communautaire. Les gens se sont partagé le poisson moyennant une somme de 1000 F Cfa le kilogramme», a-t-il soutenu. Au regard de la portée économique de cette activité piscicole, l’initiative sera démultipliée dans d’autres localités, a-t-il promis, signalant que l’organisme en charge du projet travaille dans ce sens dans le village de Simal. Dans cette dernière commune située à Fimela, dans le département de Fatick, la population est en train de mettre en place un comité de gestion en charge de l’investissement, a-t-il renseigné. Avec les perspectives de l’exploitation pétrolière, le développement de l’aquaculture, à travers le Sénégal, est devenu «une politique forte» de l’État qui vise, par ce biais, à satisfaire la demande des populations en produits halieutiques. «L’État va développer l’aquaculture pour avoir une production qui dépasse celle de la mer», a-t-il dit. (APS) PROMOTION DE LA PISCICULTURE A TOUBACOUTA Des « résultats satisfaisants » enregistrés à Santhie Béra Le projet «Go-Wamer» (gouvernance politique de gestion des ressources marines et côtières) a atteint des «résultats satisfaisants» à Santhie Béra (Toubacouta) dans le domaine de l’élevage de tilapias, a souligné, samedi, Mamadou Thiam, coordonnateur de l’équipe nationale de mise en œuvre de cette initiative. A la veille du 20ème siècle, le Saloum tombe sous l’emprise coloniale française. La fin de l’hégémonie des religieux et la signature d’une convention de protectorat, en 1891, marquent le début d’un tournant majeur dans cette partie de la colonie du Sénégal divisée en deux entités : le Saloum oriental et le Saloum occidental. Dans un contexte économique d’autosubsistance marqué par la culture du riz et du mil, l’introduction à grande échelle de la filière arachidière sous l’autorité d’Ernest Noirot, premier administrateur du cercle du Sine-Saloum, sonne le début d’une grande mutation à la fois économique, sociale et politique plus tard. Ce sont les processus de cette grande transformation que le professeur Waly Faye, enseignant-chercheur au Département d’histoire-géographie de la Faculté des sciences et technologiques de l’éducation et de la formation (Fastef) de l’Université de Cheikh Anta Diop (Ucad), retrace dans son ouvrage « Economie arachidière et dynamique du peuplement au Sénégal : Kaffrine et le Saloum de 1891 à 1960 ». Paru aux Editions Karthala en 2016 et présenté samedi dernier, à la Place du Souvenir africain à Dakar, ce livre analyse « les diverses mesures administratives qui ont encadré le cheminement, souvent forcé, des diverses communautés ethniques, mais aussi l’organisation par les confréries des déplacements des travailleurs et de leurs familles pour tirer profit des revenus monétaires procurés par l’arachide ». Pour pousser les populations à adhérer en masse à cette politique agricole, le système colonial instaure l’impôt régional. Ce faisant, analyse l’auteur, cet impôt payé en numéraire obligeait les habitants à cultiver de l’arachide pour avoir de l’argent. Malgré quelques crises notées durant cette époque et qui ont occasionné le dépeuplement du Saloum, l’instauration finalement d’une paix durable et d’un impôt régional sous forme numéraire permettront aux colons français de réussir leur politique agricole construite exclusivement autour d’une culture de rente, en l’occurrence la culture arachidière. « A partir de 1950, on constate qu’il (Ernest Noirot) a réussi son pari parce que Kaffrine se retrouve dans la zone d’une forte production », note Pr Waly Faye, pour qui cette forte production agricole va être accompagnée, en même temps, par une explosion démographique. Ouvrage historique géographiquement et sociologiquement bien documenté, « Economie arachidière et dynamique du peuplement au Sénégal… » est une réflexion pointue sur un modèle « de mise en valeur extraverti et fondé sur une surexploitation des ressources naturelles et humaines de ces terroirs ». Cette œuvre restitue avec force détails certes 70 ans de transformation économique et sociale mais également celle politique. Kaffrine, explique Pr Faye, a joué un rôle déterminant dans la cartographie électorale sénégalaise. Du fait de son poids démographique, cette entité suscitait la convoitise des hommes politiques de l’époque à l’image de Lamine Guèye et de Léopold Sédar Senghor. Le Professeur Iba Der Thiam a salué « le parcours précieux et parsemé de lauriers » de l’auteur. Selon lui, ce livre de 317 pages est d’une grande utilité, « un travail de belle facture, écrit avec beaucoup d’aisance …» L’ouvrage, a-t-il poursuivi, ne laisse de côté ni les problèmes économiques, ni les problèmes sociaux, ni les crises, ni les épidémies, ni les problèmes religieux… C’est donc, à ses yeux, une contribution irremplaçable à l’histoire générale du Sénégal. Contribution à l’histoire générale du Sénégal Pour le préfacier du livre, Pr Babacar Fall de la Fastef, dans cette partie de la colonie du Sénégal, les activités autour de l’élevage étaient désormais submergées par la « fièvre » de l’arachide qui a stimulé l’arrivé massive des populations musulmanes wolof des confréries Mouride et Tidiane. « C’est cette mosaïque de peuples et de cultures qui a produit la richesse qui porte la part du Saloum oriental à 57,89% des exportations globales de la colonie du Sénégal entre 1929 et 1940 », a-t-il indiqué. Pr Fall a, par ailleurs, insisté sur la nécessité de redéfinir les politiques de développement de la nouvelle région de Kaffrine née de la réforme de 2008. Sur ce, il préconise de faire de l’Université du Sine Saloum El Hadji Ibrahima Niass (Ussein) un instrument de mobilisation de son capital intellectuel pour accompagner les autorités nationales et locales dans leur quête pour forger une nouvelle identité à Kaffrine, jadis catalyseur économique de tout le terroir de la colonie du Sénégal. Dans le même ordre d’idées, le recteur de l’Ussein, Pr Amadou Tidiane Guiro, a informé de l’installation d’une Ufr dans la région où il est prévu un Département d’histoire. L’auteur de l’ouvrage Waly Faye est né à Gniby, arrondissement de la région de Kaffrine. Il est titulaire d’un doctorat en Histoire économique et sociale (1999). Inspecteur de l’enseignement moyen et secondaire entre 2004 et 2008, il finalise actuellement une thèse de PhD à l’Université d’Amsterdam. Ibrahima BA « ECONOMIE ARACHIDIERE ET DYNAMIQUE DU PEUPLEMENT... » DU PR WALY FAYE Radioscopie de l’évolution économique et sociale du Saloum oriental Culture de rente, l’arachide a joué un rôle déterminant dans la transformation économique et sociale de la colonie du Saloum oriental. Dans son ouvrage intitulé : « Economie arachidière et dynamique du peuplement au Sénégal » présenté, samedi, à la Place du souvenir africain, Pr Waly Faye, enseignant-chercheur à l’Ucad, retrace les mutations démographiques et économiques de cette partie du pays de 1891 à 1960. LE SOLEIL - LUNDI 12 JUIN 2017 www.lesoleil.sn Société 13 TRIBUNE DU RAMADAN Muhammad, Prophète de l’Humanité Par Professeur Khadim MBACKE 4.4-Le Prophète avec ses proches parents Le Prophète veillait particulièrement sur ses proches.. L'un de ses contemporains dit de lui qu'il était «le plus loyal et le plus soucieux d'entretenir ses liens de parenté.» Dès l’entame de sa mission, il mit un accent particulier sur l’instruction de ses proches parents et leur appel à l'islam , conformément à l'ordre reçu de son Maître en ces termes: «Et avertis les gens qui te sont les plus proches.» (Coran,26: 214). Il n’a épargné aucun effort pour convaincre son oncle paternel, Abou Talib, à se convertir à l'islam. Mais il se heurta ici à la ténacité du patriarche qui, tout en nourrissant la plus grande estime pour son neveu et tout en continuant de le protéger jusqu’au bout, préférait finir ses jours fidèle aux croyances ancestrales des siens ! De son côté, le Prophète, conscient des conséquences dans l’au-delà du refus de répondre à son appel à l’islam, mais aussi de sa dette de reconnaissance envers son oncle protecteur, se croyait autoriser à solliciter le pardon divin au profit de son bienfaiteur. Mais il ne tardera pas à recevoir ce rappel à l’ordre: «Il n'appartient pas au Prophète et aux croyants d'implorer le pardon en faveur des polythéistes, fussent-ils des parents alors qu'il leur est apparu clairement que ce sont les gens de l'Enfer» (Coran,9:113). Cependant, l’intercession prophétique ne sera pas complètement vaine car elle aboutit à l’allègement de la souffrance du bénéficiaire. Muhammad était inégalable dans son entretien de ses liens de parenté. Très attentif aux affaires de ses proches , il reconnaissait leurs statuts et mérites, les comblait de dons , les consolait en cas d'épreuve et prenait en charge leurs orphelins .C’est ce qu’il le fit avec les deux fils de son cousin Djaafar tombé sur le champs d’honneur à Khaybar en l’an VII de l’Hégire. Il confiait des postes de commandement à ceux d'entre eux qui étaient aptes à les assumer, pas pour les favoriser mais pour éprouver leur disponibilité à se sacrifier pour la cause de l’islam et donner dans ce domaine l’exemple aux autres. C'est dans ce sens qu'il confia à Ali une mission à Khaybar et plaça Djaafar à la tête des immigrés qui se rendirent en Abyssine avant de l’associer plus tard à l’expédition au cours de laquelle il subit le martyr. L'intérêt qu'il portait à ses proches ne le poussait pas à verser dans le népotisme. En effet, les premières intérêts usuriers qu'il annula revenaient à son oncle paternel, Abbas ibn Abdoul Mouttalib. Il en fit de même pour mettre fin à la vendetta perpétrée à l’époque antéislamique au nom du règlement des dettes de sang. Quand l'un d'entre eux commettait un acte répréhensible, il le dénonçait et appliquait les dispositions prévues par la loi. Invité à faire preuve de souplesse dans le traitement d’un crime commis par une dame issue de la noblesse locale, il y opposa une fin de non recevoir en déclarant que si sa propre fille se trouvait dans la même situation, il lui appliquerait la loi… Nafila du 18ème Jour 12 rakkas, soit 6 sallama. Dans chaque rakka, on doit réciter 1 fois la fatiha, 1 fois « Sabisma rabbika lahla », 1 fois « Khoul ya ayouhal kafirouna » et 1 fois « Khoul hou allahou ahad ». Il aura la récompense de celui qui posséderait toutes les richesses de la vie et qui les aurait dépensées sur la voie de Dieu, le Très Haut. Il sera ressuscité avec ceux qui seront à l’abri de la crainte et des angoisses. Vous-êtes reconduit à la tête du Rassemblement islamique du Sénégal-Ris/Al Wahda depuis le deuxième congrès de juillet 2016. Dites-nous ce qui a été fait ? Je suis le président du Rassemblement islamique du Sénégal-Ris/Al Wahda depuis 2012. En juillet 2016, j’ai été reconduit à mon poste après le premier congrès. C’est en 2009 que le Ris a été créé. Notre objectif est de créer l’islam « Wassatiya » modéré qui promeut l’économie islamique et restaure la dimension sociale de cette religion qui doit exister entre les musulmans. L’autre volet est naturellement lié à l’encadrement, à la formation et à la sensibilisation. Nous avons une Mutuelle de crédit islamique avec des guichets ouverts qui marchent comme celui de Ziguinchor, Mbour, Dakar, Mboro, Rufisque ; mais le guichet de Dakar a des difficultés. C’est pourquoi, nous l’avons arrêté à cause d’une absence de cadre légal pour exercer notre activité. La finance islamique n’avait pas de cadre légal. C’est après que l’Etat a fait des efforts avec l’Uemoa jusqu’à mettre en place ce cadre légal. Sans cela, on ne pouvait pas prendre certains risques. Nous avons créé dans les zones où l’enseignement islamique est le parent pauvre des écoles de la réforme appelée « Madarissoul islaaha ». Là où elles ont le plus marché reste Ziguinchor. Ris/Al wahda a un projet agricole et nous avons plusieurs hectares à Koudioubé. L’autre travail que nous faisons, c’est l’entraide entre musulmans. Chaque année, nous organisons une journée de solidarité et chacun d’entre nous apporte sa contribution, aussi minime soit-elle, et nous la distribuons aux plus démunis. Nous avons initié le bassin de solidarité et nous attendons les périodes de soudure. Je vous révèle qu’à une certaine période, quand tu es à Dakar, tu ne mesures pas la portée de certains dons. Mais dans les régions, ils ont un intérêt particulier pour les populations qui n’en reviennent pas. Je peux citer les villages de Saloum. Durant le mois de Ramadan, nous distribuons des kits alimentaires aux fidèles. Plusieurs associations agissent sous le nom de l’islam ; quelle est votre particularité ? Notre caractéristique réside dans le fait que nous avons des membres qui appartiennent à des tariqa (voies) soufies. Cela n’altère en rien à notre cohabitation. Nous sommes dans un monde où ceux qui ne croient pas à l’islam ont un œil sur lui. Cela occasionne les mauvaises interprétations. De plus en plus, les musulmans perdent du terrain dans leur société. Notre objectif est de faire de telle sorte que les musulmans occupent leur place. A part la partie du Fouta, nous sommes présents partout dans les départements du Sénégal. Le mouvement est dynamique et les sections s’élargissent. Entre juillet 2016 et aujourd’hui, nous avons installé cinq sous-sections comprenant au moins 15 membres par entité. On peut avoir une section de 50 membres et les responsables, de par leur volonté, font adhérer plus de membres. L’effet contraire est aussi possible. Nos activités sont guidées par la formation, l’encadrement et l’ouverture. A Oussouye, lorsque nous faisons certaines activités, les non musulmans y participent parce qu’ils y voient un intérêt. Car, elles sont liées au développement. Nous voulons maîtriser le maillage du territoire, avoir un siège fonctionnel au nom de l’association, parce que jusqu’à présent, nous sommes en location. Il nous faut avoir notre autonomie pour pouvoir exécuter notre plan stratégique d’ici à 2020. Je précise qu’au minimum, un membre cotise 1000 FCfa. Le chef de l’Etat, Macky Sall, avait pris des engagements auprès de responsables d’organisations islamiques dont la vôtre. Quel est l’Etat des lieux de ces promesses ? Il n’avait pas pris d’engagements importants parce que lorsqu’il nous recevait au Palais, il était déjà président de la République. Par contre, une partie était reçue en sa qualité de candidat à la présidence. Il avait sollicité auprès de nous la promotion du Plan Sénégal émergent (Pse). Nous lui avions fait part de notre préoccupation. Il avait demandé qu’on lui fasse parvenir des propositions ; ce travail a été déjà élaboré. C’est dans la mise en œuvre que se trouve le blocage. Récemment, il avait appelé à une rencontre pour s’enquérir de l’état d’avancement. Mais quelles sont vos réelles préoccupations ? C’est notre regard sur le développement. Il ne s’agit pas seulement de construire des infrastructures. Notre vision pour le développement est d’éduquer la personne. Il s’agit de fixer le cap, mais en corrélation avec des valeurs de patriotisme. La manière dont le pays fonctionne est tributaire d’un système qui ne favorise que les francophones ayant la chance de réussir, alors qu’ils ne sont pas majoritaires. Il y a des Sénégalais doués, mais n’ont pas choisi d’apprendre le français. Alors qu’il faut unir toutes les matières grises. La faute n’est pas imputable au président, c’est le système qu’il faut changer en l’ouvrant à d’autres. L’islam est attaqué de toutes parts à cause du jihadisme. Qu’est-ce qui l’explique ? L’extrémisme résulte d’une humiliation, d’un manque de retenu et de frustration. Les attentats de Madrid, de Pakistan, des Coptes en Egypte sont liés à des causes particulières. C’est une personne qui croit avoir subi un tort et qui décide de se venger. Mais l’islam n’a rien à voir làdessus. C’est une affaire de société. Les commanditaires d’attentats de Londres des années 80 n’étaient pas des musulmans. Mais celui le plus médiatisé est celui qui met en cause des musulmans. Même si l’attentat est avorté, on pointe du doigt l’islam. L’Occident l’encourage, parce que connaissant l’avancée de cette religion. Donc, il ne faut pas qu’on diabolise les musulmans en faisant une relation avec la violence, la haine. Les extrémistes sont des personnes qui ont des problèmes dans leur société. Ce qui se passe en Europe concerne des personnes qui n’ont aucun contact avec le monde islamique. Ils sont de purs produits de l’Occident. Ils n’ont appris l’islam qu’à travers les réseaux sociaux, les rues et s’approprient un slogan pour combattre cette religion. D’autres soi-disant islamistes portent un combat qui n’est pas le leur. Quel est le remède à cela ? Il faut une société juste et équitable permettant aux opprimés de réclamer leur droit et d’avoir une liberté de choix. C’est l’absence de justice sociale qui est à l’origine de ces attentats. CHEIKH MOKHTAR KEBE, PRESIDENT NATIONAL DE RIS/AL WAHDA « Il faut une société juste et équitable pour éradiquer le djihadisme » Originaire de Bargny, Cheikh Mokhtar Kébé a fait ses humanités au franco-arabe El hadji Ibrahima Niass de Dakar avant d’aller au Soudan pour approfondir ses études islamiques pendant huit ans. Au retour, il fait l’école normale supérieure et obtient son Certificat d’aptitude à l’enseignement secondaire (Caes). Aujourd’hui, président du Rassemblement islamique du Sénégal-Ris/Al Wahda, il jette un regard critique sur le monde islamique avec ses lunettes de professeur arabe en service au lycée moderne de Rufisque. Propos recueillis par Serigne Mansour Sy CISSE LE SOLEIL - LUNDI 12 JUIN 2017 Société www.lesoleil.sn 14 Le Rassemblement des jeunes leaders pour l’émergence du Sénégal (Rajes) a lancé ses activités autour d’un forum ce samedi 10 juin au Grand Théâtre. « Un leadership jeune pour une gouvernance locale en faveur de la création d’emplois » a été le thème retenu par les organisateurs. En effet, le président de la République Macky Sall a reconnu l’importance de la participation des jeunes aux systèmes politique, économique et social et l’a réitéré lors de la clôture de la Semaine nationale de la jeunesse en 2015. Il disait ceci : « Ce plan (Pse) est le vôtre, parce que les jeunes constituent la force vitale et l’espoir de notre pays. Je vous invite donc à vous l’approprier et à demeurer les précurseurs, les pionniers des ruptures et des changements à promouvoir en matière de gouvernance politique, économique et sociale. Soyez les artisans du Sénégal (…) ». Selon le coordonnateur, Nourou Niang, le Rajes veut mettre fin aux situations de chômage difficile des jeunes, qui sont souvent marginalisés. « Ils ne se sentent pas impliqués dans les prises de décision ; cela nous a poussés à mettre en place cette structure fédératrice ; nous voulons promouvoir la gouvernance locale », a souligné M. Niang. Il a reconnu que la question de l’employabilité des jeunes reste mondiale et ne saurait être résolue en un seul jour. « Il ne s’agit pas d’avoir à tout prix un emploi salarié ; le président a beaucoup fait dans ce domaine, mais il y a un manque d’information. Il faut que les jeunes aillent vers l’information », a déclaré le coordonnateur, qui invite les autorités à faciliter l’accès aux financements et au foncier. A en croire Nourou Niang, cette orientation repose essentiellement sur le principe de base selon lequel le soutien à la participation politique des jeunes devrait s’étendre tout au long du cycle électoral. Mais il doit également être significatif et efficace, allant au-delà des gestes symboliques. Ce forum veut promouvoir aussi l’autonomisation et le leadership jeune en milieu rural pour une gouvernance locale en faveur de la création d’emplois. Le panéliste Barka Bâ invite à relever le défi de l’éducation et de la formation. Il a aussi rappelé la détermination des jeunes dans les crises 68 et 88. Pour lui, ces derniers y ont joué un rôle majeur. De son côté, Abdoul Aziz Diop, conseiller spécial du président de la République, a confié qu’au sortir de ce panel, les jeunes devraient être en mesure de se rapprocher des services compétents pour l’auto-emploi. « Les jeunes font et défont les rois, mais ils ne sont pas impliqués dans l’exercice du pouvoir », a constaté M. Diop. Serigne Mansour Sy CISSE Une délibération confirmée par un arrêté du gouverneur de Thiès, le 12 juin 2006 et confirmée par le décret présidentiel du 27 janvier de la même année et publié au journal officiel. « Ce décret sous le numéro 2006-84 déclarant d’utilité publique le projet de construction de logements sur un terrain du domaine national situé à Daral Peul, dans la communauté rurale de Keur Moussa, d’une superficie de 26 889 m² et prescrivant l’immatriculation au nom de l’Etat dudit terrain », liton sur un dossier administratif remis à la presse par le président de la coopérative, Mamadou Mangassouba. Selon lui, forts de ces actes administratifs dont l’un, le décret évoqué fut signé par le président de la République Abdoulaye Wade et contresigné par son Premier ministre Macky Sall, l’actuel chef de l’Etat. « Ainsi, notre coopérative a eu à construire une piste latéritique pour faciliter l’accès après avoir saisi les chemins de fer du Sénégal qui a autorisé à ouvrir un passage à niveau; puis nous avons installé un réseau électrique et une autre d’adduction d’eau sur une longueur de 6 kilomètres suite à un dossier complet fourni à ces services », a-t-il ajouté. C’est pourquoi, le président de la coopérative des Ong a soutenu que « lorsqu’en 2008 des éléments de l’Armée sont passés pour détruire des constructions, des fondations, des poteaux électriques, des lampadaires, des bornes sans sommation et sans saisine de notre coopérative ; nous avions saisi les autorités administratives et un comité régional de développement sur la reconstitution du domaine militaire a été tenu. A l’issue, par courrier n°0087/Emg/Dei/Clt-T du 25 mars 2008, le chef d’étatmajor général des Armées décide de laisser les Ong conserver leur lotissement situé au sud-ouest de l’école polytechnique de Thiès ». Malgré tout, en mars 2016, la coopérative constate que l’Armée est revenue à la charge, une convocation du commandant de la gendarmerie tombe. « Nous avons répondu en fournissant un dossier complet et conforme que nous avons aussi déposé auprès du procureur de la République. C’est donc dans cet atmosphère pesant que le 31 mai dernier des éléments supposés de la Dscos ont sillonné tout le site pour écrire sur les murs de nos habitations en construction Arrêt Dscos31/05/2017 », a dénoncé Mamadou Mangassouba. En présence du chef de village de «Daral Peul», du député Hélène Tine et de la majorité des bénéficiaires des 302 logements en construction dans la cité sont mobilisés pour défendre leurs intérêts de citoyens conformément aux lois et règlements du Sénégal. « Dans cette affaire, nous faisons appel au chef de l’Etat Macky Sall, chef suprême des Armées, parce que nous estimons que le Sénégal est un Etat de droit afin que de tels incidents cessent une fois pour toute. Nous tenons aussi à alerter l’opinion nationale, voire même internationale sur ce dictat que nous ne saurions accepter », a-t-il soutenu. Pour avoir investi dans la viabilisation du site plus de 2 milliards de FCfa déjà et pour avoir respecté toutes les procédures en vigueur pour l’accès au foncier au Sénégal, les membres de la coopérative des Ong se disent déterminés à défendre leur site acquis légalement. Mbaye BA LITIGE FONCIER A THIES La coopérative des Ong s'en ouvre au chef de l’Etat Hier, les membres de la coopérative des Ong se sont réunis sur le site de Daral Peul pour dénoncer des harcèlements subis par leurs membres qui sont en train de construire leurs logements. Ce site leur avait été affecté depuis 1998, suite à une délibération de la communauté rurale de Keur Moussa sur une superficie de 24 hectares, 80 ares et 84 centiares. CONFERENCE AUTOUR DU DIALOGUE ISLAMO-CHRETIEN La conférence était animée par Oustaze Pape Hann sur « Dialogue islamo-chrétien », un thème d’actualité vécu dans toute sa dimension au Sénégal par les deux communautés chrétienne et musulmane. Surtout que ce rassemblement intervient en cette période du jeûne du mois béni du Ramadan musulman ponctué par des prières et recueillements. « Nous avons saisi cette opportunité que nous offre ce mois béni, moment de communions, de prières et de partages pour organiser cette conférence religieuse », a souligné Mme Seynabou Ndiéguène, responsable des femmes Apr et présidente du conseil d’administration du Petit train bleu (Ptb). Le thème choisi «dialogue islamo-chrétien» revêt pour les femmes de la coalition Bby une importance particulière en ce sens que, comme l’a souligné Mme Ndiéguène, « la plupart des villages environnants de la commune de Thiès sont habités par des chrétiens. Et, comme vous le savez, nous travaillons en parfaite synergie avec les femmes catholiques. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi ce thème ». Le conférencier a beaucoup insisté sur le sujet tout en indiquant « que le dialogue islamo-chrétien est un pan important de consolidation de la paix dont la femme constitue un pilier incontournable ». Les femmes de la coalition Bby de Thiès entendent ainsi jouer leur partition dans tous les processus de paix au Sénégal et pourquoi pas à travers le monde, a laissé entendre Mme Seynabou Ndiéguène. Elles ont saisi l’opportunité de ce mois de prières et de recueillement pour solliciter également auprès de Dieu le Tout-Puissant qu’il accorde une paix durable au Sénégal et surtout pour des élections apaisées ». Mohamadou SAGNE Trois billets pour la Mecque et Rome offerts aux femmes de Thiès Les femmes de la coalition Bby ont offert, cette année, trois billets pour le pèlerinage à la Mecque et celui de Rome. Elles ont saisi l’occasion de leur conférence religieuse organisée le week-end dernier pour les remettre aux heureuses bénéficiaires que sont Adja Fama Aidara de Thiès commune et Ndèye Faye Mbaye de Keur Mousseu, conseillère municipale, pour la Mecque et Mme Joséphine Ndione « Sosso », présidente de groupements de femmes catholiques, pour le pèlerinage à Rome. Les défunts étaient des amis âgés de 20 ans et habitaient le quartier Boucotte-Sud appelé communément Grand-Dakar. Mamadou Siradio Diallo dit Thierno était chauffeur de taxi et Oumar Cissé, élève en classe de 5ème au Collège d’enseignement moyen (Cem) de BoucotteSud. Vendredi dernier, ils avaient choisi d’aller se baigner à la berge du fleuve Casamance située au quartier Goumel. A l’image des nombreux jeunes, ils se retrouvent en masse, comme on en voit tous les jours, le long des berges du fleuve Casamance, du quartier Boudody à celui de Goumel, en passant par le quartier Escale. Surtout en cette période de canicule, qui a aussi coïncidé avec le mois béni du Ramadan. Malheureusement pour Oumar Cissé et Mamadou Siradio Diallo, ils ne sont plus revenus de leur baignade. En effet, le premier n’a pas pu ressortir de l’eau après une plongée dans le fleuve. Et le second, qui est allé aussitôt à sa rescousse, n’a pas réapparu. Alertés, les sapeurspompiers ont rapidement entamé les recherches. C’est le lendemain samedi, vers 18h 30, que les corps sans vie des deux copains ont été retrouvés à quelques encablures de l’endroit où ils se baignaient. Cette énième noyade à Ziguinchor pose à nouveau sur la table la sécurité des personnes, notamment des jeunes, qui fréquentent les nombreuses berges du fleuve Casamance pour prendre du plaisir à nager, à jouer ou à se rafraîchir. Sapeur-pompier de son état, Boubakar Thiam a rappelé que les berges du fleuve Casamance ne sont pas autorisées à la baignade. Il a souhaité que les autorités compétentes y mettent des surveillants pour réduire les nombreux cas de mort par noyade qui sont enregistrés chaque année au grand dam des familles des victimes. El Hadj Moussa SADIO NOYADE DANS LE FLEUVE CASAMANCE Les corps des deux amis retrouvés à Goumel Les corps sans vie des deux jeunes garçons Mamadou Siradio Diallo dit Thierno et Oumar Cissé, qui étaient portés disparu vendredi dernier lors d’une baignade à la berge du fleuve Casamance à hauteur du quartier Goumel de Ziguinchor, ont été retrouvés par les sapeurs-pompiers après 24 heures de recherches. EMPLOI DES JEUNES Le Rajes lance ses activités La création d’emplois est un défi que souhaite relever le Rassemblement des jeunes leaders pour l’émergence du Sénégal (Rajes), qui a lancé ses activités ce week-end. Mme Seynabou Ndiéguène, responsable des femmes Apr. CYANMAGENTAJAUNENOIR L u n d i 1 2 j u i n 2 0 1 7 GERMAINE ACOGNY A la charnière entre le « local » et le « global » À première vue,Djilor donne l’impression d’être un coin perdu sur terre. Situé entre Foundiougne et Passy, cet ancien royaume somnole et baigne dans une quiétude exceptionnelle.Malgré son « louma » (marché hebdomadaire) et les quelques activités quotidiennes, la vie y semble ensevelie dans une léthargie sans nom. Avec le rôle qu’il a joué dans l’histoire du Saloum, Djilor Djognick,qui n’a rien à voir avec Djilor Djidiack situé dans l’arrondissement de Fimela, dans le département de Fatick, n’est pourtant pas de ces villes à taille humaine où l’on trouve facilement des vestiges préhistoriques ou historiques. Mais ce gros village qui affiche une mine de papier mâché est riche de son passé et regorge de secrets cupidement conservés par les gardiens de la tradition. Difficile d’en trouver un pour nous entretenir sur cette glorieuse époque. Mais à force de chercher sans pour autant fouiner, on en trouve. Abdou Soulèye Ndiaye, qui paraît mieux connaître l’histoire de cette contrée,accepte volontiers de nous aider à dépoussiérer cette page de l’histoire du Sine Saloum et du Sénégal. Ce septuagénaire qui s’est fait mémoire vivante à force de recherches est une source passionnée et passionnante.Cet ancien chef du Centre d’expension rurale (Cer) est convaincu que Djilor Djognick est l’une des plus anciennes localités du Sine Saloum.Pour nous plonger dans le passé de cette contrée, il s’est armé de ses notes et de sa riche documentation.Sa soif de savoir et de connaissances l’a poussé à tout consigner les moindres détails dans des cahiers.Jadis,nous dit-il, Djilor Djognick était un repère pour les lions et les éléphants. C’était vers le XIe siècle. Le domaine était tellement riche et il y avait beaucoup de lions, de panthères et d’éléphants. Selon lui, la fondation de Djilor daterait de 1080. Une fondation qui, préciset-il,fait l’objet de deux versions.La première l’attribuant à Samba Sarr et la seconde à Diégane O Math.« Chaque famille a sa version. Chez les Pouma, qui sont une lignée matrilinéaire,ils vous diront que Djilor a été créée par Diégane. La famille Sarr vous dira que Djilor a été créé par Samba Sarr ».Toutefois, assure-t-il,Djilor a un cycle évolutif très clair. « Cette contrée a été fondée, dévastée totalement par des guérillas puis refondée », indique-t-il.Au cours de son évolution, dit M.Ndiaye,Djilor Djognick a connu plusieurs dénominations :Djilor Sandakewé,Djilor Diogoy Fou gnithie,Djilor Saré Mbégane dandé maayo,Djilor Abdou Soulé,Djilor Saloum… Pour le vieil Abdou Ndiaye, les lamanes sont les premiers à venir à Djilor. « Ils ont mis le feu,ont coupé les arbres pour habiter ici », précise-t-il. Approximativement, notet-il,leur pouvoir va de 1080 à 1248.Évoluant, Djilor a reçu des conquérants venus du Gabou,en Guinée-Bissau.Il s’agit des « Nianthios » (Guélewar en wolof).« Ils sont venus dominer et conquérir Djilor. Ils ont duré ici et sont les premiers créateurs du royaume du Djognick », souligne M. Ndiaye. Avant que leur pouvoir ne disparaisse,les «Nanthios» ont élu huit rois,partant de Sira Badiar Mané,qui réussit à devenir la première reine de Djilor, à Birane Djické Mané. Jamais à court d’anecdotes,ce vieil homme transmet son récit avec passion. « Nianthio signifie "nous sommes les plus grands guerriers, c’est nous qui avons créé la dynastie donc, nous sommes les rois" ». Le peuple avait accepté cette suprématie en les suivant. Les «Nianthios» se sont battus pour s’imposer et tout le monde avait accepté leur bravoure et leur noblesse », relève-t-il. À en croire l’ancien chef de CER, « le Nianthio est une lignée matrilinéaire ».« On ne se levait pas du jour au lendemain et dire qu’on était Nianthio.Il se transmet de mère à fils.Votre mère est nianthio,vous êtes nianthio, votre père est nanthio, vous n’êtes pas nianthio.C’était leur organisation et les wolofs ont pris le mot à la volée et ont dit Guélewar », raconte-t-il. Mais, le règne sans partage des Guélewars prend fin avec la victoire de Latmingué Diélègne Ndiaye sur Birane Djické Mané. Et pourtant, indique M. Ndiaye, le guerrier « nanthio » a résisté pendant sept ans, avant de tomber dans le piège tendu par Latmingué. « Il est tombé dans un trou creusé à son insu et a été enseveli vivant.Cette victoire a marqué l’arrivée des «Thiédos» », explique-t-il. C’est à partir de cet instant,en 1517,que Djilor est devenu une province vassale. Selon M. Ndiaye, le règne des Thiédos a démarré avec Mbagnick Diop cette même année jusqu’à Diène Coumba Ndiaye qui fut le 30e roi. « Ils ont tous été nommés à partir de Kahone.Aucun ne l’a été à partir de Djilor. À l’époque, le roi de Kahone, après son intronisation, appelle son cousin, son grand frère ou son oncle et lui dit, je te lègue Djilor », renseigne-t-il. C’est donc la colonisation qui a marqué la fin du pouvoir des «Thiédos», marquant ainsi l’arrivée des chefs de canton dont le premier à Djilor fut Fara Guédél Mbodji en Considéré comme l’une des plus anciennes localités du Sine Saloum, Djilor Djognick a fortement marqué l’histoire du Sénégal. L’existence de cette contrée qui a été tour à tour occupée par les Lamanes, les Nianthios et les Thiédos dépasse largement les 900 ans. Mais son passé reste méconnu de la plupart des Sénégalais et, pourtant, elle a une histoire riche en évènements. Plus de dix siècles n’ont pas suffi à sortir Djilor Djognick de son inquiétant anonymat inquiétant et à connaître un essor digne de ce nom. UNE DES PLUS ANCIENNES LOCALITES DU SINE-SALOUM Djilor Djognick tombé dans l’oubli Dakar, terre d’espoirs et de déboires. Ville lumière, de torpeur, de tortuosité où viennent s’inhumer les âmes en peine. Dakar a, à la fois, des airsd’uneluxueusemétropoleetd’unvastecloaquehumainoùl’opulence et la misère ont signé une clause d’indifférence. On se croise, on s’épie dédaigneusement. On foule la patte du chien comme on le ferait avec la jambe d’un « malfamé » en pleine divagation. Est-il d’ailleurs en errance ? Il est dans sa vaste cour ; la cour du roi où on trimbale cinq sachets d’eau pour trouver fortune, où on glande chaque matin à la quête de la « bonne affaire ». Une bonne dame étourdie laissera peut-être tomber son sac à main ou un gadget électronique que son « errant international », à l’autre bout du monde, s’est tué à lui dégotter. L’errance, ce n’est plus « aller çà et là ». Elle est devenue une résultante des espoirs immenses, de notre façon d’envisager la réussite et de nous en targuer et, de manière globale, de la désarticulation des relations humaines. Le vieil homme laissé à lui-même, à sa sénilité – parce que nous n’avons pas su « tropicaliser » l’hospice –, le fou – l’asile ne lui convenant pas –, l’ivrogne – pour s’accorder du répit –, le gueux, le chat et le chien – comme une souris évitant la tapette –, cherchent à se poser quelque part dans leurs masures, ces rues publiques, à avaler leur pitance. Où ? Nulle part ailleurs que dans les espaces de morositéespérantquelquefoissusciterlacompassion Errance « domestiquée » Par Alassane Aliou MBAyE Suite à la page 16 Suite à la page 16 Par Mohamadou SAGNE, Samba Oumar FALL (textes) et Ndèye Seyni SAMB (photos) CYANMAGENTAJAUNENOIR 16 Lundi 12 juin 2017 UNE DES PLUS ANCIENNES LOCALITES DU SINE-SALOUM Djilor Djognick tombé dans l’oubli 1931.Il y eut ensuite Momar Betty Bâ, Baba Ly, Abdou Soulèye Bâ, selonAbdou Soulèye Ndiaye.Avec l’accession à l’indépendance, il y a eu des les chefs d’arrondissement. Djilor en a connu six, de Sambou Touré à Alpha Touré, selon M. Ndiaye. À leur suite, il y a eu dix sous-préfets, d’Amadou Sy à Sidy Mokhtar Fall.Au total,précise Abdou Soulèye Ndiaye, Djilor a vu passer 61 hommes de commandement.« Aucun d’entre eux n’est né à Djilor », regrette-t-il. «Thouroum Pèthie», une fête païenne qui résiste encore À Djilor,les Guélewars ont légué à la postérité une fête qui subsiste encore et qui est célébrée chaque année en leur honneur.Il s’agit du «Touroum Pèthie» ou «Thiouram Pèthie». Cette tradition fait partie de leur patrimoine culturel.Chaque année, la famille qui doit faire le « tour » vient faire son sacrifice, sucre et lait versé sur le tombeau des Guélewars.Ce rite est perpétué régulièrement et depuis des siècles, selon le vieil Abdou Soulèye Ndiaye. Cette cérémonie a toujours lieu un vendredi et draine les populations de la contrée, hommes, femmes, jeunes filles et garçons,enfants,tous âges confondus. « C’est un grand moment de fête, de retrouvailles et de communion qui se prépare toute l’année. Il y a du rythme et on danse toute la nuit jusqu’à l’aube à la place du village. Le lendemain, la fête continue.De 8 à 12 heures,un concours était organisé pour élire l’homme le plus généreux. C’était une occasion d’étaler toute sa générosité. On procédait également à l’élection de la plus belle fille et aussi de la meilleure danseuse », explique-t-il. La participation de la communauté à cette commémoration était donc essentielle et tout le monde s’impliquait. «Thiouram Pèthie», explique M. Ndiaye, est une commémoration en l’honneur des «Nianthios». « Quand ils ont quitté le Gabou et ont fondé leur royaume à Djilor, on avait envoyé à la reine Sira Badiar Mané une monture de cheval pour la féliciter de cette grande réussite. La selle était merveilleusement confectionnée,mais elle renfermait un sort.Quand le cadeau est venu, la reine se trouvait en tournée à Lérane, à 15 km au sud de Djilor. Elle a alors demandé à un enfant du nom de Diégane Coumba de la mettre sur son cheval et de lui garder la scelle dans sa chambre », indique-t-il.« Entre Lerane etYerwago, il y a une petite rivière. Arrivée à cette hauteur,l’enfant a eu des maux de ventre.Il s’est tordu de douleur et a vomi de petites pierres. Il ne survivra pas à ses douleurs et est mort sur le cheval qui l’a amené jusqu’au village.Un autre enfant subira le même sort.Ayant finalement compris que la selle était atteinte mystiquement,elle a été jetée dans un bolong et le problème était résolu », fait savoir Abdou Soulèye Ndiaye.Ces deux enfants,nous ditil,sont enterrés à Lélwane dans une position debout comme tous les «Nianthios» d’ailleurs. Et leurs tombes,informe-t-il,sont toujours présentes dans cette localité. Aujourd’hui encore, la tradition est bien conservée à Djilor.Cette grande fête païenne y est célébrée chaque année avant l’hivernage. Aux origines de la lutte traditionnelle Tout comme les «Nianthios»,les «Thiédos» ont également laissé une fête. Il s’agit de la lutte traditionnelle dont la première organisation remonte à 1781, selon M. Ndiaye. Une guerre de succession qui a mal tourné a été à l’origine. En effet, raconte le vieil Abdou Ndiaye, Djilor, à une certaine époque, était resté sans roi. « C’est alors que Biram Ndiémé Niakhana Ndiaye appelle son neveu Biram Codou Niakhana pour lui offrir le trône. Ce dernier quitta Kahone pour venir à Djilor. Mais quand son cousin Diène Sanou Faye a entendu la nouvelle, il a interpelé son oncle.Mais ce dernier lui fit la confirmation », expliquet-il. « Je n’ai pas commis d’erreur. Biram Mbodji Codou est né au Saloum alors que toi ton père est né au Sine.Si tu veux un royaume, va le chercher au Sine et laisse Biram Mbodji Codou tranquille », avait alors lancé le roi à son neveu. Non content de cette décision, Diène Sanou Faye défia alors son oncle.Décidé à prendre le pouvoir, il se résolut alors à combattre son cousin Biram Mbodji Codou.Leurs mères étaient de même père et même mère, précise le septuagénaire. « Quand Diène Sanou Faye enfourcha son cheval,sa tante,qui se trouve être la mère de Biram Mbodji Codou,l’appela et lui remit deux pagnes. Elle lui dit : « le premier appartient à ta mère et le second est le mien. Comme on t’a interdit et que tu as refusé,amène ces deux pagnes avec toi. Quand vous aurez combattu, si tu le tues, couvre-le avec le pagne de ta mère. Si c’est lui qui te tue,qu’on te couvre avec mon pagne ». « Lamb buur » Suite à ces recommandations, Diène Sanou Faye s’en alla.Malgré les négociations, les deux protagonistes n’avaient pu trouver un terrain d’entente. Pour se départager, les deux prétendants au trône engagèrent une rude bataille au cours de laquelle Diène Sanou fut touché par balle. Il succomba par la suite à ses blessures et moins d’une semaine plus tard, Biram Mbodji Codou fut intronisé. Une intronisation qui divisa totalement le royaume. L’ambiance était devenue invivable, pourrie. Il n’y avait plus de solidarité ni cette fraternité et toutes ces valeurs qui faisaient la force de Djilor. « C’est par la suite qu’un sage homme est venu vers le roi pour lui demander d’organiser une séance de lutte pour retrouver cette cohésion »,fait savoir Abdou Soulèye Ndiaye. C’est ainsi, dit-il, que le «Lamb buur» a été initié. « C’était un grand moment de fête et de réjouissances. Les préparatifs duraient jusqu’à un mois. Il y avait du couscous et de la viande à profusion.Les combats avaient lieu de vendredi à vendredi et démarraient à midi pour ne prendre fin qu’au coucher du soleil. Les villages périphériques lutaient le lundi jusqu’à jeudi puis entraient en lice des Niominka du vendredi au dimanche ». Selon M. Ndiaye, un seul trophée était mis en jeu. C’était une tunique appelée « thialite » en sérère.« À chaque édition, de grands lutteurs,des champions aguerris, venaient de partout et s’affrontaient. La première finale a opposé Leyti Loum à Khomba Diouma Sène de Lérane.Ce dernier fut d’ailleurs le premier vainqueur de l’épreuve et jusqu’à aujourd’hui, les hymnes et autres glorifications entonnés en leur honneur résonnent encore », rappelle-t-il. « C’est cette pratique qui a aujourd’hui évolué vers une activité culturelle et sportive, mais la lutte traditionnelle a été organisée pour la première fois à Djilor.C’était en 1781 », précise-t-il. Malheureusement, déplore le vieil homme,cet évènement qui a beaucoup contribué à ramener et à renforcer la cohésion sociale a perdu de son ampleur. « Ce passé prestigieux n’intéresse pas les populations de Djilor.Tous les petits-fils sont partis et ont laissé le village à lui-même ». Pour cette incursion,Djilor l’anonyme n’a pas livré tous ses secrets. Et pour éviter que son riche passé ne se perde à jamais,le vieilAbdou Soulèye Ndiaye qui a développé un esprit chercheur à Bambey où il effectuait son service vétérinaire avant d’être transformé en chef de Cer pendant dix ans, se bat pour écrire un livre et permettre à la postérité de se réapproprier l’histoire et la culture de Djilor Saloum. Et c’est à partir du procès-verbal du séminaire de Pencuum buur tenu le 9 avril 1992 qu’il a glané toutes les informations qu’il a à sa disposition. « Ce que je raconte là n’est ne vient pas de moi. Ce sont des informations que j’ai glanées auprès de dignitaires et historiens du Djiognick », avoue-t-il modestement.« J’ai senti que ce séminaire était une nécessité.Je suis alors allé à Kaolack,j’ai formulé une demande et j’ai été financé à hauteur de 120.000 FCfa par Conrad Adenauer. C’est avec ce financement que j’ai organisé cette rencontre pour connaître l’histoire du Diognick », note-t-il. des « âmes sédentaires » trop souvent pressées et elles-mêmes dans une éternelle et profonde errance dans leur « aventure » intime. L’errance n’est pas forcément en mouvement. Elle est dans l’espérance, dans une quête incertaine. Dakar offre, dans ce sens, à voir un monceau d’images de « petites gens » pour ainsi reprendre le cinéaste Djibril Diop Mambety, d’animaux et parfois de choses qui cherchent (ou se cherchent) à rencontrer la fortune, la quiétude. Le petit talibé est-il en errance ? Il habite la rue. Le fou l’est-il davantage ou moins que lui ? Le chien ou le maître ? C’est le maître parce que sa femme lui mène la vie dure ? Saitil seulement où il va ? L’humeur routinière du maître a peut-être fait connaître au clébard sa destination finale ? Au cours du trajet, il rencontrera le chiot sans maître ou son « grognon » rival, lui aussi sans seigneur. C’est le maître et son chien qui sont en errance ou ceux qu’ils rencontrent dans la « pègre », dans le « taudis à ciel ouvert ». C’est leur demeure. Ils sont à l’étroit chez eux. Ici, ils peuvent se shooter avec de la cameàmort.Onlesregarderadédaigneusement mais on ne les délogera point parce qu’ils sont chez eux. Lecontrastedenosruesenconstantemétamorphose met en scène des « errants de luxe » et des « errants domestiques ». Dakar, à défaut de devenir comme Paris, met en lumière cette ambivalence. Le drame est qu’elle est devenue refuge de toutes les aspirations parce que tout le monde veut y arriver et la seule allée mène à la capitale sénégalaise. Le valeureux et jeune agriculteurn’envisagelaréussitequedansune«promenade » avec quelques camelotes dans la capitale. La poursuite du rêve de grandeur ressemblefortàuneaventureincertainequil’installe dans une errance à travers un désert, dans un sentiment de devoir rempli parce qu’il faut bûcher, s’accomplir là où on ramasse des billets debanqueetlesdistribueensuitedanslessoirées mondaines. Et ainsi donner à ses rêveries une couverture honorable, « beugg teki rek ». Ps : passez-moi mon errance Errance « domestiquée » Par Alassane Aliou MBAyE Suite de la page 15 Suite de la page 15 Abdou Soulèye Ndiaye, historien CYANMAGENTAJAUNENOIR 17Lundi 12 juin 2017 La Banque Postale a lancé le système de paiement par reconnaissance vocale « Talk to Pay » qui devrait faciliter et sécuriser les transactions des clients… « Parler pour payer ». Tel est le nouveau leitmotiv de la Banque Postale. Ce dispositif est désormais possible grâce au lancement dès ce mardi, du tout premier moyen de paiement en ligne par reconnaissance vocale. Plus besoin de sortir sa carte de son porte-monnaie, la vérification des données bancaires se fait désormais grâce aux nouvelles technologies. Après cinq ans de discussions dont trois ans de tests et environ 300 testeurs, le projet est arrivé à maturité. Si la Banque Postale est pionnière en la matière c’est parce qu’elle a été la « première à croire en cette technologie », avance Aurélien Lachaud, directeur des innovations paiement de la Banque Postale. Une fierté pour M. Lachaud qui précise que cette collaboration est entièrement française puisque la start-up «Talk to Pay», malgré son nom anglophone, est bel et bien française. Effectuer des achats sur n’importe quel site L’objectif principal est de pousser davantage la sécurité des paiements en ligne. Le principe est simple, pour dix euros par an (ou cinq euros pour les étudiants) le client peut activer cette option sur son compte en ligne et doit alors « enregistrer six fois la même phrase pour que le logiciel de biométrie vocale prenne en compte toutes les fréquences de la voix », précise Aurélien Lachaud. Une fois cette action réalisée, il peut librement effectuer des achats sur n’importe quel site.Au moment de choisir le mode de paiement, il sélectionne ce moyen puis valide son paiement et enclenche ainsi un processus. Un appel automatique survient sur son téléphone et l’usager doit alors prononcer la phrase qu’il a paramétrée auparavant et ensuite indiqué un code reçu par message. Ce moyen de paiement « suspend automatiquement le cryptogramme visible sur le dos d’une carte », indique Aurélien Lachaud, ce qui facilite amplement la transaction puisque plus besoin de sortir sa carte bleue. Au niveau de la sécurité tout a également été pensé, surtout en cas de vol de carte. L’usurpateur ne pourra effectuer aucun achat sur internet car il sera bien difficile pour lui de contourner la reconnaissance vocale mise en place. Cette nouvelle technologie pose de nombreuses questions sur la sécurité, notamment sur l’utilisation par autrui de ce système. Qui n’a jamais confondu au téléphone la voix de deux personnes de la même famille ? Aurélien Lachaud apparaît sûr de ce système : « Il repose sur les fréquences de la voix, sur les phonèmes » détaille-t-il. En d’autres termes, le logiciel capture la plus petite unité vocale d’une personne et permet ainsi de la différencier parmi tant d’autres. Même après une longue soirée à crier, si votre voix est altérée, il vous sera toujours possible de parler pour payer, assure Aurélien Lachaud. « Sauf si vous avez la voix cassée ! » Mais il ne peut confirmer que Talk to pay ne rencontrera pas de faille : « Aucune technologie n’est aujourd’hui 100 % fiable, nous ne nous engageons pas à promettre ça. » La Banque Postale lance le premier paiement par reconnaissance vocale KarimFallaliasLefaestunrappeur né le 28 novembre 1985 à Paris. Il est un des fondateurs et membre du collectif de rappeurs parisiens Sexiond'Assaut.Ilestaussiuntrès bon danseur de break dance, l’ayant pratiqué des années durant. Après plusieurs années d'absence, Lefa revient sur le devant de la scène en juin 2015 avec un nouveau single Intro et sort son premier album solo « Monsieur Fall » en 2016. Né d'un père sénégalais musicien de jazzCheikhTidiane Fall et d'une mèrefrançaisechorégrapheetartthérapeute, il grandit rue des Abbesses à Paris. Durant son adolescence, il pratique la danse, plus particulièrement le break dance. En 2012, Lefa n'apparaît plus sur scène avec les autres membres du collectif, le groupe le dit « en pause musicale » pour se consacrer à sa vie personnelle mais promet un retour prochainement. Dans ses lyrics, Lefa évoque très souvent ses expériences personnelles. Il se contente de faire transcrire ses vérités et se veut plus prudent de l'image qu'il renvoie à ses fans. Il aborde souvent des thèmes qui peuvent toucher tout le monde comme lematérialisme,sonindignationdevantcertainsactesposésparleshommes, sa propre évolution et celle de la Sexion d'Assaut, l'avarice, les futilités, les jeunes parents. Il est très souvent influencé par l'ambiance des quartiers populaires de Paris comme le manque d'argent, la délinquance, etc. Il ne montre pas ses yeux, il les cache avec une paire de lunettes ou parfois avec la visière de sa casquette, cela afin de mettre une « barrière » entre sa carrière et sa vie personnelle, tout comme le fait Maître Gims. Le style d'écriture de Lefa est immédiatement reconnaissable parmi les autresrappeursfrancophones,avecl'emploifréquentderimesembrassées. Parmi ces particularités, on peut noter l'utilisation de mots en verlan, caractéristique de l'accent parisien des quartiers populaires, ou de mots issus de l'argot américain. Lefa, le rappeur qui parle à la jeunesse ! Par Oumar BA CYANMAGENTAJAUNENOIR 18 Lundi 12 juin 2017 TROIS RAISONS D’AIMER… GERMAINE ACOGNY, DANSEUSE ET CHOREGRAPHE Germaine Acogny est de ces âmes qui voguent en silence vers des rivages où affleurent des émotions à la fois violentes, tendres et profondes qui la gagnent ellemême, nous envahissent et nous emportent dans un quelque part où la gestuelle fait sens. Elle est un univers poétique, discursif, de rencontres et de synthèse.Car,celle qu’on appelle affectueusement et légitimement la mère de la danse contemporaine africaine opère une exquise greffe (qui a pris) entre les danses traditionnelles africaines et celles-là occidentales pour être à la charnière du « local » et du « global » et décliner un message d’humanité. Son génie est reconnu ici. Il est célébré ailleurs.Les éloges décernés ne sont jamais assez répandus pour les âmes qui s’échinent à dessiner des mondes possibles et à secouer notre intérieur. « Mama Germaine » ne faisait pas (l’on peut aussi employer par prudence parce que les danses africaines respectent le corps selon elle) que se mouvoir le corps. Elle incarne des vies, explore des possibilités, stimule des imaginaires et les développe avec l’autre pour créer une fusion avec les « Esprits »,avec la nature.Avec le néant aussi. Ici,au Sénégal,terre qu’elle a foulée à l’âge de cinq ans, elle a été faite « Chevalier de l’Ordre national du Lion », « Officier des Arts et des Lettres »… Ailleurs,en France, une de ses terres de prouesse, elle est faite « Chevalier de l’Ordre du mérite », « Officier des Arts et des Lettres », « Chevalier de l’Ordre de la Légion d’honneur », élevée au rang de « Commandeur dans l’Ordre des Arts et des Lettres » et, le mois dernier, au rang d’« Officier de la Légion d’honneur ». Les hommages d’admiration et de respect dont elle a été comblée, dans toutes les sphères de « décryptage » de sa gestuelle, témoignent de sa grandeur d’âme et de sa foi en la mission qu’elle s’était destinée à accomplir. Honneur ne saurait être plus réconfortant que celui-là après lequel on ne court point. Et la « divinité des sables », pour ainsi reprendre des éloges d’autres cieux,poursuit sa promenade de grâce le long d’une allée où le silence d’humilité est rythme ;et le mouvement,tout un pan de notre aventure collective consigné. Car, dans le continent noir, le corps, plus que l’écrit, est un espace de mémoire. En 2014, elle est classée par le magazine « Jeune Afrique » parmi les 50 personnalités africaines les plus influentes dans le monde. « Jeune Afrique » accompagnait cette reconnaissance de ces mots dont le Sénégal et l’Afrique peuvent tirer fierté : « Germaine Acogny a fait sortir la danse africaine de son ghetto folklorique pour la hisser au rang d’art noble,forgé au cours de longues années d’apprentissage – loin des clichés qui voudraient que la danse en Afrique, on ait ça dans le sang ». Le temps la vénère Le temps est complice d’une œuvre utile, accomplie. Celle de Germaine Acogny est magistrale. Il y a un fait loin d’être anodin qui en atteste. L’actuelle directrice du ballet la Linguère duThéâtre Daniel Sorano,fleuron national et « temple » d’exploration et de consignation des identités culturelles, Ndèye Bana Mbaye, fut son élève à Mudra-Afrique (école de danse fondée par Maurice Béjart,en 1977, avec le soutien du poète-président Léopold Sédar Senghor).Germaine Acogny en était la directrice. Ndèye Bana Mbaye se faisait alors appeler « Acogny 2 ».En outre,la plus grande salle de spectacle du Sénégal, le Grand Théâtre, est dirigée par Keyssi Bousso,également un ancien pensionnaire de cette grande école fermée en 1982. Ils ont fait leur chemin et investi d’autres univers de rythmes,mais l’âme de la « pionnière » les (nous) peuplera éternellement. Il y a toujours un geste,une parole, un lieu, un événement, qui nous rappellent l’auteure du livre « Danse africaine » édité dans plusieurs langues. Elle évoque même notre cheminement collectif.Alors que les autorités de la jeune République du Sénégal s’échinaient à asseoir une indépendance économique et politique, Germaine Acogny,elle,s’attachait à instaurer notre « souveraineté culturelle », à forger notre identité. Qui n’a pas frémi devant les spectacles offerts par les corps domptés des majorettes du Lycée John Fitzgerald Kennedy à l’occasion des fêtes de l’indépendance ? Qu’il aurait été incommode de célébrer des rythmes d’ailleurs les jours d’affirmation de notre souveraineté. Rien que pour avoir écourté cet affront,l’inspiratrice de cette chorégraphie mérite que nous nous répandions en éloges sur la fondatrice, en 1985, du studio-école Ballet-théâtre du 3e monde à Toulouse. Tout autant que le défunt percussionniste, Doudou Ndiaye « Rose », qui l’accompagnait dans cette noble entreprise d’affirmation de notre être profond. Germaine Acogny embrasse d’autres cultures sans perdre ce qui la rend unique : demeurer elle-même comme pour narguer le temps. Ame généreuse La danseuse et chorégraphe confiait à la journaliste de Radio France internationale Sarah Tisseyre ceci : « La danse n’est pas innée. Nos danses patrimoniales et traditionnelles sont extrêmement complexes. Elles nécessitent un apprentissage. Moi, j’ai pris l’essence des danses traditionnelles d’Afrique de l’Ouest et celles que j’ai apprises en Europe, et j’ai créé ma propre technique où les mouvements sont initiés par la colonne vertébrale ». L’ancienne directrice artistique de la section danse d’Afrique en création à Paris et des rencontres chorégraphiques de danse africaine contemporaine ne s’est pas contentée de la gestuelle de sa grand-mère, prêtresseYorouba, ni des danses sénégalaises qu’elle a apprises, encore moins de la parodie presque dédaigneuse de ceux-là qui ont eu la chance d’apprendre les danses occidentales. Germaine Acogny s’est forgée une identité. Et le monde lui reconnaît sa technique. Des danseurs de tous les horizons s’y meuvent. Un mot pourrait résumer l’œuvre de la franco-sénégalaise d’origine béninoise : partage.Elle a partagé ses émotions sur les scènes du monde mais surtout ses connaissances, son savoir-faire. L’Ecole des sables, une institution unique dans son genre en Afrique, bourg côtier de Toubab Diaw, qu’elle a fondée avec son époux Helmut Vogt, en est une illustration achevée. Elle organise des stages de formation professionnelle pour les danseurs d’Afrique et du monde.Patrick Acogny,son fils,chorégraphe également,en est le directeur artistique. Elle s’emploie à ce que le danseur se serve de son corps comme d’une « plume pour écrire un poème dessiné dans l’espace ». Quand le geste est poésie, la parole pour le traduire est image. A la charnière entre le « local » et le « global » Par Alassane Aliou MBAyE LE SOLEIL - LUNDI 12 JUIN 2017 www.lesoleil.sn Idées & Réflexion 19 Dans le cadre de sa récente tournée sous-régionale, Son Excellence le président de la République du Ghana, M. Nana Akufo-Addo, élu en 2016 au premier tour des élections présidentielles (avec un suffrage de 53 %), a effectué une visite de travail et d’amitié du 15 au 17 mai au Sénégal. Lors de la conférence de presse du 16 mais 2017 au Palais de la République, les présidents Sall et Akufo-Addo ont fait part de leurs décisions d’accroître la coopération bilatérale entre leurs pays respectifs, mais aussi du partage d’expérience du Ghana sur les gestions des ressources naturelles, telles que le pétrole et le gaz. Cette décision du président Macky Sall est à saluer. En effet, le Ghana, récent producteur d’hydrocarbures, a, dans son Code pétrolier, élaboré des cadres juridiques qui serviront d’apport considérable dans son économie nationale. A travers notre modeste contribution, nous montrerons que cette décision du président Macky Sall de vouloir un partage de savoir-faire ghanéen sur la gestion de ses ressources naturelles n’est pas fortuite, mais bel et bien fondée, et relève d’une vision d’accroître la part de participation locale dans la chaine de valeur pétrolière au Sénégal. Notre analyse portera, en premier lieu, sur une brève comparaison géographique et démographique entre le Ghana et le Sénégal, ensuite nous définirons le concept d’indigénisation d’un secteur, et plus spécifiquement au niveau du secteur des hydrocarbures, ainsi que son impact sur l’économie locale. En troisième lieu, nous analyserons deux cas pratiques d’indigénisation du secteur pétrolier ghanéen à travers le programme appelé « Local content » ou « Contenu local », et montrerons finalement que l’indigénisation d’un secteur n’est pas un signe de fermeture sur soi-même, mais un facteur d’attraction d’Investissements directs étrangers (Ide). Le Ghana, pays d’environ 28 millions d’habitants (14,5 millions pour le Sénégal), a une superficie de 238.533 km² (196.722 km² pour le Sénégal) et un taux de croissance de 2,42 % par an (2,16 % pour le Sénégal). Sur le plan économique, le Ghana a un Produit intérieur brut (Pib) estimé 22,238 milliards de FCfa (8,200 milliards pour le Sénégal). L’économie ghanéenne repose sur les produits agricoles comme le cacao (deuxième producteur mondial), le café, mais aussi miniers, tels que l’or (dans la région d’Ashanti, Takoradi, etc.), et plus récemment le pétrole. Au niveau du classement des activités portuaires, le Port de Téma traite, chaque année, environs 820.000 conteneurs, contre 400.000 pour le Port de Dakar. Néanmoins, il est à préciser que le Port de Téma sert aussi aux pays voisins du Ghana dont le Nigeria (utilisation due aux difficultés du Port de Lagos), le Burkina Faso et autres Etats enclavés limitrophes. L’indigénisation est un concept par lequel on rend « indigène » ou on accroît la présence ou la représentation locale dans un certain secteur. Dans le cas d’indigénisation du secteur pétrolier, on accroît la présence locale dans le secteur pétrolier. Ce concept est important dans le sens où on encourage les locaux qui n’ont pas les capitaux pour investir ou la compétence intellectuelle de prendre leurs parts dans cette activité. Il est à noter que l’indigénisation est un concept graduel, car la présence étrangère est et sera toujours nécessaire à cause du phénomène de la mondialisation. En effet, cette présence étrangère n’apporte pas juste des capitaux mais aussi des compétences intellectuelles. Le transfert de compétences intellectuelles est donc primordial. Ce procédé d’indigénisation accroîtra alors la présence de locaux dans la chaîne de valeur pétrolière, permettra, sur un autre registre, la création d’entreprises appartenant à des Sénégalais(es) et une valeur ajoutée dans l’économie locale. Une récente étude, menée par le bureau d’études américain Ihs Markit pour le compte du département d’Energie (l’équivalent du ministère de l’Energie), illustre l’importance de la chaine de valeur des hydrocarbures et son impact : « Les avantages économiques de l’activité pétrolière et gazière dans une vaste chaîne d’approvisionnement dépassent de loin les avantages pour l’industrie elle-même. Chaque nouvel emploi de production crée trois emplois dans la chaîne d’approvisionnement et six autres emplois dans l’économie en général. Les contributions au produit intérieur brut (Pib) se multiplient aussi : chaque dollar de Pib créé dans le secteur du pétrole et du gaz génère deux dollars dans la chaîne d’approvisionnement ». A travers ces propos, nous voyons l’impact exponentiel que peut avoir l’activité pétrolière dans une économie. Il est donc recommandé que le Sénégal ouvre l’exploration de ses champs pétroliers au plus grand nombre de candidats ayant la capacité technique et financière. En 2007, une certaine compagnie dénommée Kosmos Energy (à l’époque dirigée par le légendaire Jim Musselman et dont le film-documentaire, « Big Men », produit par l’acteur Brad Pitt, fait le récit de son aventure ghanéen) fit la découverte d’un important gisement pétrolier d’une réserve estimée entre 1,8 et 2 milliards de barils qui sera nommée le champ Jubilee et dont la production journalière actuelle est entre 100-150.000 barils jours. Quelques années plus tard, en 2013, l’Assemblée nationale ghanéenne a voté la loi L.I 2204, intitulée « Petroleum regulations 2013 (Local content and Local participation) ». C’est une série de mesures ayant pour but d’accroître la présence de Ghanéens ou les entreprises ghanéennes (dans lequel un capital minimal devrait appartenir à une personne de nationalité ghanéenne), dans les secteurs des hydrocarbures. Cette présence peut être faite à travers des entreprises de prestations de services telles que : • Prestations intellectuelles : Bureau d’études ; • Entreprise de fabrication et de production ; • Entreprise d’approvisionnement, transport, logistique ; • Entreprise à vocation Qhse. Il est important de préciser qu’une chaîne de valeur pétrolière est généralement divisée en trois groupes : En amont : au niveau des champs pétroliers (offshore ou onshore) où on cherche l’existence de la matière. Et si on en trouve, on l’extrait (donc on produit). En midstream : à ce niveau, on transporte (à travers des tankers, des barges, des pipes, etc.) la matière première trouvée en amont vers des points de transformation (raffinerie) ou de stockage. En aval : ici, la matière première a été transformée et est prête à être distribuée à la masse (à travers les stations d’essence par exemple). L’indigénisation du secteur pétrolier ghanéen affecte toute la chaîne de valeurs ou les trois secteurs qui ont été énumérés plus haut. Nous précisons que le travail en amont étant une phase stratégique qui requiert des moyens (techniques et financiers) conséquents, la présence locale est souvent difficile à garantir. Néanmoins, toutes activités connexes aux activités en amont peuvent voir la présence de locaux. La loi LI 2204, Petroleum regulations 2013 (Local content and Local participation) a pour objet : (a) Promouvoir la maximisation de la valeur ajoutée et la création d’emplois grâce à l’utilisation de l’expertise, des biens et des services locaux, les entreprises et le financement dans la chaine de valeur de l’industrie pétrolière et leur rétention dans le pays ; (b) Développer les capacités locales dans la chaine de valeur de l’industrie pétrolière par l’éducation, le transfert de compétences et le développement d’expertise, le transfert de technologie et de savoirfaire et dans les programmes de recherche et de développement ; (c) Atteindre le niveau minimum d’emploi local et, dans le pays, dépenser pour la fourniture des biens et des services dans la chaîne de valeur de l’industrie pétrolière comme spécifiée dans la première annexe ; (d) Accroître la capacité et la compétitivité internationale des entreprise domestiques ». Un premier exemple de la loi LI2204 stipule que toute entreprise étrangère actif dans les prestations de tous services dans le secteur pétrolier (envers un tiers, ou envers un détenteur d’un bloc pétrolier, ou envers la Société nationale des pétroles) devra créer une entreprise joint-venture avec une société indigène et attribuer au moins 10 % des parts sociales de la société de joint-venture à l’entreprise indigène : • Interest of a citizen in petroleum operations (6) A non-indigenous Ghanaian company which intends to provide goods or services to a contractor, a subcontractor, licensee, the Corporation or other allied entity within the country shall incorporate a joint venture company with an indigenous Ghanaian company and afford that indigenous Ghanaian company an equity participation of at least ten percent. Un deuxième exemple de la loi LI2204 stipule le transfert de compétences techniques et de technologies aux entreprises indigènes ; toute société qui facilitera le transfert de technologies (preuves à l’appui) pourrait être éligible à des avantages fiscaux dont les modalités seront définies par les autorités gouvernementales compétentes : • Support for technology transfer to indigenous Ghanaian companies 25. (1) A contractor, subcontractor, licensee or other allied entity shall support and facilitate technology transfer as regards the formation of joint ventures, partnering of licensing agreements between indigenous Ghanaian companies or citizens and foreign contractors and service companies or supply companies. (2) The Minister shall consult with relevant Government agencies to propose fiscal incentives to assist:’ (a) foreign companies which aim to develop technological capacity and skills of citizens; and (b) Indigenous Ghanaian companies which establish factories and production units in the country. (3) For the purposes of sub regulation (2), the Government agencies consulted shall collaborate with the Commission. (4) The Commission shall propose the criteria for obtaining the fiscal incentives Il est à noter que la Société sénégalaise des pétroles (Petrosen) a, dans son modèle de contrat type de partage de production, en ses articles 19 du Titre IV, des clauses d’indigénisation, telles que le transfert de compétences techniques et la promotion de l’emploi local. D’après la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), l’investissement direct étranger (Ide) en 2014 a été de 201,8 milliards de FCfa, mais que les points atténuant les investissements direct étrangers étaient, entre autres, la pauvreté et la faible diversité des activités. La compétence sénégalaise est connue et reconnue, toutefois, sa difficulté à avoir des fonds de fonctionnement et d’investissement l’est aussi. L’indigénisation du secteur pétrolier accroîtra l’activité économique locale, augmentera le pouvoir d’achat mais aussi et surtout le pouvoir d’investissement local. Ce dernier donnera suite à une pluralité d’opportunités au Sénégal qui augmentera évidemment les investissements direct étrangers. En conclusion, le chef de l’Etat a la volonté de vouloir rendre le secteur d’hydrocarbures sénégalais le plus inclusif possible. Il est important de comprendre que des dispositions d’indigénisation sont en cours d’élaboration. Une délégation sénégalaise est attendue à Accra afin d’avoir un meilleur aperçu sur les dispositions ghanéennes devant permettre de définir un cadre adapté au Sénégal et qui lui est propre. Levier de développement économique du Sénégal Par Mamadou Oumar SY, Ing. Président du Mouvement Diappo Plateau Membre du CCR Sénégal diappoplateau@gmail.com L’INDIGENISATION DU SECTEUR PETROLIER : L’EXEMPLARITE DU GHANA
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